Préhistoires ou L’Idiot de la famille avant l’heure

Préhistoires de Jean Rouaud

prehistoriquemoderneLa préhistoire a déjà assuré le succès de romans marquants tels que La Guerre du feu ou Pourquoi j’ai mangé mon père. La période a l’avantage de laisser aux auteurs toute la latitude romanesque voulue là où le flou historique persiste. Cette liberté a permis à la préhistoire, peut-être davantage qu’à d’autres périodes de l’Histoire, d’être utilisée comme toile de fond romanesque mettant en scène les questions de société d’une époque (le développement des technologies dans Pourquoi j’ai mangé mon père) ou bien pour laisser place aux obsessions plus personnelles d’un écrivain. C’est le cas de Préhistoires de Jean Rouaud.

L’écrivain a déjà longuement disserté sur la naissance du romancier, de l’artiste qu’il est devenu dans L’invention de l’auteur. Il prolonge ici sa réflexion en retraçant la genèse de l’art des cavernes. On retrouvera donc quelques traits de l’auteur dans cet homme qui pour la première fois découvrit le pouvoir qu’il avait sur le groupe en dessinant du bout du bâton dans le sable la forme d’un animal. On reconnaîtra L’idiot de la famille décrit par Sartre dans la figure de cet artiste relégué dans sa caverne parce que chétif et donc inutile à la chasse et au groupe. Cependant seront déjà esquissés les rapports que le pouvoir et l’art entretiendront dans les millénaires qui suivront : notre pauvre peintre devra, pour être nourri par le groupe, représenter le courage du chef du clan face aux mammouths tout en se réservant la liberté de le ridiculiser dans une autre de ses peintures, à l’abri des regards.

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