Salman Rushdie s’attaque au « politiquement correct » américain

Dans son roman La Maison Golden, au détour de considérations sur la fragile bulle dans laquelle vivent les universitaires américains, Salman Rushdie s’attaque au politiquement correct d’une université en proie à des démons déjà évoqués par Philipp Roth dans La Tâche : religions, gender studies, racisme anti-raciste, anti-colonialisme, …

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Une bulle est chose fragile et le soir il arrivait souvent aux professeurs d’envisager avec inquiétude qu’elle pût éclater. Ils s’inquiétaient du politiquement correct, de ce collègue à eux qui s’était retrouvé à la télévision face à une étudiante de vingt ans qui lui hurlait des insultes en plein visage à quelques centimètres de distance à cause d’un désaccord sur le journalisme de campus, de tel autre collègue injurié lors d’une émission d’informations à la télévision pour avoir refusé d’interdire le costume de Pocahontas lors d’Halloween, de leur collègue contraint de prendre un congé sabbatique d’au moins un séminaire pour n’avoir pas suffisamment défendu “l’espace sécurisé” d’un étudiant contre l’intrusion d’idées que celui-ci estimait trop “dangereuses” pour que son jeune esprit les affronte, de leur collègue bravant une pétition d’étudiants demandant qu’on retire du campus de l’université une statue du président Jefferson malgré le fait répréhensible que Jefferson avait eu des esclaves, de leur collègue dénoncé par des étudiants issus de familles de chrétiens évangélistes parce qu’il leur avait demandé de lire un roman graphique dont l’auteur était une lesbienne, de leur collègue contraint d’annuler une représentation des Monologues du vagin d’Eve Ensler parce qu’en définissant les femmes comme des personnes dotées d’un vagin la pièce discriminait les personnes qui se considéraient comme étant de sexe féminin sans pour autant avoir un vagin, de leurs collègues s’opposant aux efforts de certains étudiants voulant empêcher les musulmans apostats de s’exprimer parce que leurs idées offensaient les musulmans non apostats. Ils s’inquiétaient de voir les jeunes de plus en plus favorables à la censure, aux interdictions diverses, aux restrictions, “comment cela avait-il pu arriver, me demandaient-ils, ce rétrécissement de l’esprit de la jeunesse américaine, nous commençons à avoir peur des jeunes”.

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